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Inscriptions des pouvoirs

Inscriptions des pouvoirs dans l'espace

Lieux centraux et pouvoir décentralisé

Atelier proposé par Gabrielle Frija & Jens Schneider

Cet atelier sera centré sur l’analyse des phénomènes et des processus d’interaction entre l’espace et les agents du pouvoir. Dans une perspective comparée, il s’agira d’étudier des formes d’institutions territoriales ainsi que l’importance des différents types de lieux pour leur constitution. Contrairement aux propos de Friedrich Ratzel (1882) ou de Fernand Braudel (1946), les structures spatiales, communément appelées paysages, provinces ou régions historiques, ne seront pas considérées comme des entités expliquant en elle-même la création de provinces, comtés, duchés ou regna, mais au contraire comme des produits des institutions politiques et spatiales.

On insistera plutôt dans cet atelier sur l’aspect généré des « entités perçues comme telles » (Genicot 1989), c’est-à-dire que l’on comprendra un espace politique, culturel, spirituel ou administratif comme un espace ou un lieu performé par l’homme, tout en restant un ensemble dynamique, soumis au changement. Sans nier l’importance de la dimension administrative des circonscriptions, telles que la province romaine, la paroisse ou le diocèse médiévaux, on rejoint la définition du terme territoire proposée par Piroska Nagy (2005) : « un espace approprié par une communauté, à travers l’exercice d’un pouvoir ».

Dans l’analyse du rôle des lieux sur la « production de l’espace » (Lefebvre 1974) et, plus particulièrement, sur la gestion du pouvoir personnel et institutionnel, on se concentrera sur deux points forts :

1. La ville produite

L’évolution qui fait d’un site modeste une villa rustica, une aula regis, puis un palais, qui deviendra à son tour une cour princière, une ville, est une question ancienne. Cependant, ce sont principalement le caractère et le fonctionnement du palais ou de l’hôtel royal au Moyen Âge d’une part, l’évolution de la ville ou de la cité d’autre part, qui ont été étudiés jusqu’à présent.

L’atelier se propose d’étudier dans une perspective diachronique des cas exemplaires pour arriver à une définition du lieu central–lieu de pouvoir bien au-delà des Zentralorte décrits par Walter Christaller (1933) ou Caspar Ehlers (2007). Pour approcher la problématique sous un nouvel angle, on s’interrogera sur plusieurs critères possibles tel l’existence (ou l’état) d’une administration, d’une production culturelle (literacy en particulier) ou la participation à une structure supérieure. Cette approche comprendra la genèse des phénomènes urbains ainsi que l’évolution et le rayonnement des institutions religieuses (monastère, diocèse).

2. Les vecteurs du pouvoir

La gestion de l’espace implique une répartition du pouvoir entre différents niveaux d’autorité, ce qui peut s’instaurer par la délégation du pouvoir. En laissant de côté le rôle des lieux dotés d’un pouvoir excentré (voir ci-dessus), on analysera la fonction des institutions représentant le pouvoir central (préfets, missi et autres lieutenants) et leur relation avec les niveaux locaux de pouvoir et d’administration. On se demandera comment le détenteur d’un pouvoir impérial, ducal, épiscopal etc., parvient à imposer sa volonté politique en province, dans la mesure où il cherche à le faire, de façon très inégale selon les périodes et les lieux. On s’interrogera ainsi que les rapports entre le pouvoir central et les pouvoirs locaux ou régionaux.

Parmi les aspects à étudier, on relève la présence physique et la présence symbolique du pouvoir, l’assurance et l’accessibilité d’une juridiction, mais aussi la question des fondements du pouvoir d’un puissant (préfet, duc, comte, évêque), délégué d’un pouvoir supérieur ou représentant des élites locales.

Plutôt que de réseau, on parlera de vecteurs de pouvoir.

Un deuxième angle d’approche peut être constitué par l’étude du point de vue des pouvoirs locaux et de la façon dont ils définissent leur relation avec le pouvoir central : on s’intéressera ainsi aux discours de légitimation et d’appropriation du territoire construits dans une négociation avec les pouvoirs centraux, aboutissant à une souveraineté partagée par plusieurs niveaux d’autorité sur un même espace.

Agenda

Atelier IMC Leeds, 12 juillet 2011 : « Between Palatium and Court. Political and Symbolic Spaces throughout the Middle Ages »
publié en partie dans Florilegium, 29 (2012)

Séance du Séminaire de recherche du laboratoire ACP, 20 janvier 2012

Atelier IMC Leeds, 3 juillet 2013 : « Peripheral Territories in Early Medieval Europe (9th–11th C.) »

Suite de 3 ateliers, IMC Leeds, 9 juillet 2015 : « Reform and Renewal in Burgundy », I-III, sessions 1526, 1626, 1726

Publications

G. Frija, Les prêtres du culte impérial romain dans les cités de la province d’Asie, http://www.pretres-civiques.org (depuis novembre 2009)

– « Administrar o territorio das cidades no imperio romano » dans Territorios, Poderes, Identidades,  A. Pereira Campos et al. dir., Vitoria, 2012, p. 91-104

–  « Prêtres locaux de l’empereur et multi-citoyenneté : études de cas » dans Patrie d’origine et patries électives : les citoyennetés multiples dans le monde grec d’époque romaine, A. Heller et A.-V. Pont dir., Bordeaux, 2012, p. 113-125

Les prêtres des empereurs. Le culte impérial dans la province romaine d'Asie, Rennes, 2012

H.-D. Heimann et J. Schneider, « Kloster – Landschaft – Klosterlandschaft ? », dans Klosterland­schaften. Methodisch-exemplarische Annä­herungen,  R. Czaja et al. dir., Munich, 2008, p. 9-22

J. Schneider, « Monastères et scriptoria en Lotharingie (IXe–Xe siècles) », Bulletin de la Commission royale d’Histoire, 176, 2010, 21-39

– « Punkte im Raum. Zur Bedeutung von Orten für die Ausbildung von Herrschaft », dans Territorium, Tobias-lib, Tübingen, 2013, http://nbn-resolving.de/urn:nbn:de:bsz:21-opus-67066

– « D'Empires et de frontières. La pratique de la frontière du IXe au XIIIe siècle », Revue belge de philologie et d'histoire, 91, 2013, p. 1187-1210

J. Schneider & T. Martine, « La production d’un espace : débuts lotharingiens et pratiques de la frontière (IXe-XIe siècle) », Revue de géographie historique, 2014, 19 mai 2014