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Le travail scientifique interdisciplinaire

réalités et contraintes

Programme ANR (2010-2013)

Responsables : Patrick Trabal (Paris-Nanterre) ; Cécile Collinet (UPEM), Philippe Terral (Toulouse)

Les appels récurrents à l’interdisciplinarité et les annonces répétées exhortant les chercheurs à ne pas s’enfermer dans leurs disciplines, reviennent à souligner l’existence de difficultés dans la mise en œuvre de ce type de travail collaboratif.  Les mises en exergue du caractère « pluridisciplinaire » ou « interdisciplinaire » de leur activité lorsque les chercheurs complètent des dossiers pour la reconnaissance de leur laboratoire ou pour l’obtention de quelques crédits, peuvent être lues comme des réponses à une volonté politique. Mais au-delà de l’affichage, on souhaite interroger comment dialoguent les disciplines scientifiques mobilisées sur un même domaine ou sur un même sujet, et donc décrire les épreuves qu’affrontent les acteurs.
Notre travail consistera à questionner les expériences du travail pluri-inter-transdisciplinaire. Notre propos ne vise pas à contribuer à une discussion épistémologique sur l’intérêt ou la possibilité de l’interdisciplinarité mais de regarder, sur une série de cas bien construite, les modalités de ce travail scientifique. Nous chercherons à décrire les activités ordinaires des chercheurs, en nous déparant de deux dangers. L’un consisterait à épouser un point de vue normatif ce qui revient à rompre la position de neutralité axiologique nécessaire pour saisir notre objet. L’autre, très lié au premier, tendrait à transformer ce questionnement de sociologue des sciences en une activité de contrôle et d’évaluation des pratiques des chercheurs. Notre objectif n’est pas de mesurer l’écart entre les revendications de recherches interdisciplinaires et la réalité des pratiques, mais de pouvoir décrire quand et comment les acteurs des différentes disciplines s’efforcent de dialoguer, s’opposent en se repliant sur leurs positions, défendent leurs spécificités, parviennent (ou non) à produire des nouvelles connaissances. Il s’agit donc d’une étude des processus qui pose la possibilité de différents états : la cohabitation dans une institution labellisée « interdisciplinaire » et les querelles de territoires, la discussion sur les notions plus ou moins partagées par les différentes disciplines (avec tous les malentendus et toutes les clarifications nécessaires), l’opposition sur le juste niveau de description, l’affirmation des modes d’évaluation de chaque discipline, l’accord sur des méthodes et des métrologies, la production d’énoncés reconnus par plusieurs communautés de chercheurs.
Pour répondre à cette exigence de saisir la complexité des réalités de l’interdisciplinaire, il convient de se donner un espace de variation avec une relative unité, mais qui garantit la co-existence et la possibilité de dialogue entre plusieurs disciplines. Nous avons choisi de porter l’analyse sur un objet qui convoque une pluralité de disciplines. Les travaux scientifiques portant sur les activités physiques et sportives rassemblés sous l’expression anglo-saxonne de Sport Sciences sont principalement menés, dans l’espace national, dans les départements ou UFR STAPS (Sciences et Techniques de Activités Physiques et Sportives), qui sont des composantes des universités. Le sport, unanimement qualifié d’objet pluridisciplinaire, présente l’avantage de figurer comme un enjeu théorique et empirique pour les sciences dites « dures » (comprenant la valence « technique » induite par les « sciences de l’ingénieur » mais aussi des liens avec des questions de santé) et pour les sciences humaines et sociales. Ce terrain nous invite donc à décrire toute une série de relations entre les chercheurs et les disciplines auxquelles ils appartiennent – tout autant de ce que certains considèrent comme « une/des science(s) du sport » – se déclinant entre des collaborations étroites, des dialogues sur le niveau pertinent d’analyse ou sur la validité des métrologies, en passant par des affrontements portant sur la légitimité de ces disciplines, qui posent la question de la finalité de la recherche pour ses « utilisateurs » et d’une façon plus générale, pour la société.

L'équipe

Ont participé à ce projet trois équipes des universités Paris-Est Marne-la-Vallée (ACP), Paris-Nanterre (ISP) et Toulouse (SOI)

Équipe UPEM : C. Collinet, D. Bernardeau Moreau, É. Levet-Labry, M. Delalandre

Publications

P. Trabal, C. Collinet et P. Terral, Le travail scientifique Interdisciplinaire, Rapport de recherche ANR, 2013, 154 p. (texte en ligne)